Charleroi : capitale européenne des terrils

Monsieur le Bourgmestre,

Notre ville, riche de ses nombreux terrils, témoigne d’un passé industriel fort et d’une identité singulière. Ces collines, vestiges de l’exploitation minière, représentent aujourd’hui un potentiel considérable pour le développement touristique, culturel, environnemental et économique de Charleroi.

À cet égard, l’exemple de la station de ski de Loisinord, à Nœux-les-Mines dans le Pas-de-Calais, illustre parfaitement comment un terril peut être réhabilité et transformé en un lieu de loisirs innovant. Ce site unique en Europe propose une piste de ski synthétique de 320 mètres de long, aménagée sur un terril de 129 mètres de haut. Ce projet a non seulement revitalisé un espace anciennement industriel, mais a aussi dynamisé l’économie locale en attirant les visiteurs et en soutenant les commerces de proximité.

Charleroi n’est pas étrangère à ce type d’initiatives audacieuses : on se souvient de Monsieur le Bourgmestre chaussant ses skis pour descendre l’un de nos terrils en hiver ! Si l’anecdote a pu faire sourire, elle illustre surtout, de manière très concrète, le potentiel de ces sites pour accueillir des activités récréatives originales et renforcer l’attractivité de notre territoire.

Dans cette optique, je vous pose les questions suivantes :

  1. La Ville de Charleroi envisage-t-elle de promouvoir officiellement son statut de « capitale européenne des terrils », en valorisant ses terrils de manière cohérente et ambitieuse ?
  2. Des projets sont-ils en cours ou prévus pour aménager certains terrils en sites récréatifs ou touristiques, à l’instar de Loisinord, afin de renforcer l’attractivité de notre ville et de dynamiser le commerce local ?
  3. La Ville a-t-elle envisagé de lancer des partenariats public-privé pour soutenir ces projets, tant sur le plan financier qu’opérationnel ?
  4. Quelles actions concrètes sont envisagées pour soutenir le commerce local à proximité des terrils, en favorisant des synergies durables entre ces espaces réhabilités et les acteurs économiques existants ?
  5. Des collaborations sont-elles prévues avec la Maison du Tourisme du Pays de Charleroi pour promouvoir ces initiatives de valorisation des terrils auprès des visiteurs, dans une logique de stratégie touristique intégrée ?
  6. La Ville prévoit-elle des publications, supports pédagogiques ou actions de communication spécifiques
    pour sensibiliser la population à la richesse et à l’histoire de ses terrils ?
  7. Enfin, des initiatives sont-elles envisagées pour mettre en valeur notre passé industriel, en intégrant des éléments de mémoire et d’éducation dans les projets de valorisation des terrils ?

Je vous remercie de bien vouloir apporter des réponses détaillées à ces questions, afin que nous puissions évaluer les ambitions concrètes de la Ville en matière de valorisation de son patrimoine minier, de développement économique local et de rayonnement territorial.

Bien à vous,
Benjamin Buyle

Réponse de JANDRAIN Babette, Echevine

Monsieur le Conseiller,

Je vous remercie pour cette question fort pertinente qui met en lumière l’importance stratégique de nos terrils dans le développement touristique et économique de notre ville.
Du Nord de la France jusqu’en Wallonie, les terrils, par centaines, témoignent du passé commun d’une zone transfrontalière s’étendant des Hauts-de-France au Hainaut et au-delà. Vestiges d’une histoire industrielle, les terrils ont acquis, au fil du temps, un statut complexe : tout à la fois lieux de loisirs, milieux naturels et sites patrimoniaux à préserver.

Au sein de cet arc minier transfrontalier, les terrils constituent la charpente paysagère de Charleroi avec plus ou moins 30 terrils dits « signaux », appartenant à la Ville, à la Région wallonne ou à des propriétaires privés. Parmi les plus remarquables et emblématiques, notons, ceux du Site du Martinet – entité classée au Patrimoine wallon et significative d’une réelle dynamique citoyenne et d’un processus de reconversion durable – ou encore du Bois du Cazier, site dont la valeur universelle exceptionnelle a été reconnue par l’UNESCO en 2012, dans le cadre de l’inscription des Sites Miniers majeurs de Wallonie sur la liste du
Patrimoine de l’Humanité. Notons encore, pour exemple, le « maillage » de la Chaîne des terrils de Dampremy, Marchienne-Docherie et Roux se situant sur le périmètre de la Porte Ouest.

Les terrils constituent donc un patrimoine unique et un atout majeur pour Charleroi. Votre référence à Loisinord est particulièrement éclairante et démontre le potentiel de transformation de ces sites emblématiques de notre passé industriel.

Permettez-moi de répondre point par point à vos interrogations :

  1. Concernant la promotion du statut de « capitale européenne des terrils » : Bien que Charleroi ne détienne pas officiellement ce titre, nous sommes pleinement conscients de la singularité et de la densité exceptionnelle de nos terrils. Plus de 30 terrils dits « signaux » jalonnent notre territoire, ce qui constitue une richesse paysagère remarquable. Cette reconnaissance mériterait effectivement d’être explorée dans le cadre d’une réflexion plus large sur notre stratégie de rayonnement territorial. Actuellement, nous participons activement, via la Maison du Tourisme, au projet Interreg VI « Destination Terrils II » (2024-2028), qui vise à promouvoir l’attractivité de 15 ensembles de terrils du bassin minier franco-wallon.
  2. Projets d’aménagement récréatifs et touristiques : Des initiatives concrètes sont déjà en cours. Le Terril du Martinet constitue un exemple emblématique de réhabilitation réussie, accueillant désormais un vignoble, des ruches, la ferme du Martinet et un projet de paysage productif avec plantation de miscanthus. Une signalétique complète y a été installée. Dans le cadre du projet européen, de nouvelles initiatives sont prévues sur le territoire : chasse Totemus, réalisation de podcasts, balades artistiques, packages touristiques, circuits points-nœuds pédestres. Je ne dois pas vous le rappeler, la Boucle noire rencontre déjà un franc succès auprès du public.
  3. Partenariats public-privé : La Ville n’exclut pas le recours à des partenariats public-privé pour accompagner certains projets de valorisation, dans le respect de nos engagements en matière de durabilité, d’inclusion et de préservation environnementale. Toute initiative devra faire l’objet d’une concertation préalable avec les parties prenantes locales et les citoyens. Le financement actuel des projets s’appuie sur les fonds européens, régionaux et une prise en charge de la Maison du Tourisme.
  4. Soutien au commerce local : Des chantiers participatifs et itinéraires touristiques visent à créer des dynamiques locales autour des terrils : circuit vélo-piéton, visites guidées, chasse au trésor et événements artistiques. Ces initiatives stimulent naturellement le flux touristique à proximité des commerces, créant des synergies économiques durables. La création de parcours attractifs et de circuits touristiques fait partie intégrante de notre stratégie de redynamisation urbaine.
  5. Collaboration avec la Maison du Tourisme : La Maison du Tourisme du Pays de Charleroi est partie prenante du partenariat Interreg et contribue activement à la promotion des terrils. Cette collaboration, déjà effective, sera renforcée dans le cadre de projets ciblés pour développer une stratégie touristique cohérente et intégrée autour de notre patrimoine industriel et naturel.
  6. Communication et sensibilisation : Le projet inclut une large palette d’outils de communication : podcasts, audioguides, chasses au trésor, cartes et signalétique, brochures explicatives, formation de guides ambassadeurs bénévoles. Ces actions sont renforcées par une communication digitale (site web, réseaux sociaux) et des événements dans un esprit de découverte respectueuse et inclusive.
  7. Valorisation du passé industriel et éducation patrimoniale : La valorisation de notre mémoire industrielle fait partie intégrante de notre politique patrimoniale. Les futurs aménagements des terrils intégreront des dispositifs d’interprétation, de médiation et des
    installations artistiques évoquant l’histoire minière. Des actions de sensibilisation sont régulièrement menées : balades guidées, publications, projets scolaires.

Il est essentiel de souligner que cette valorisation se fait dans le respect de la biodiversité exceptionnelle que recèlent nos terrils. Ces sites abritent de nombreuses espèces protégées qui ont recolonisé ces espaces, constituant un patrimoine naturel unique qu’il convient de préserver.

En conclusion, les terrils de Charleroi ne sont plus perçus comme des stigmates du passé, mais comme des balcons naturels sur la ville, des vecteurs de renouveau et des atouts touristiques majeurs. Notre approche conjugue mémoire, innovation, environnement et durabilité, en lien étroit avec les citoyens, les associations et les acteurs économiques du territoire.

Je reste naturellement à votre disposition pour tout complément d’information.
Je vous remercie.

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